Mémorial des policiers français Victimes du Devoir

« Il y a quelque chose de plus fort que la mort,
c’est la présence des absents dans la mémoire des vivants. »

Jean d’ORMESSON

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Gardien de la paix

Laurent GÉRARD

Victime du Devoir le 04 octobre 1994

Département

Paris (75)

Affectation

Sécurité Publique (PP) — Paris 11ème

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Circonstances

Cause du décès

Homicide par arme à feu

Contexte

Forcené retranché, périple meurtrier

Au cours de la soirée du mardi 4 Octobre 1994, deux individus cagoulés et armés escaladaient le grillage de l’enceinte de la pré-fourrière de Pantin, en bordure de périphérique parisien.

Les deux policiers de garde furent directement menacés par leurs fusils à canons sciés et délestés de leurs armes de poing et cartouches de réserve ; puis les malfaiteurs neutralisèrent le téléphone.

Il s’agissait d’un couple de marginaux proche du milieu anarcho-libertaire cherchant à obtenir des armes pour commettre des braquages et subvenir ainsi à leur existence anticonformiste : Florence Rey, dix-neuf ans, et Audry Maupin, vingt-deux ans.

Leur forfait terminé, le duo comptait regagner discrètement leur squat à Nanterre en utilisant les menottes des policiers pour les neutraliser ; cependant ceux-ci en étaient dépourvus. Les malfrats aspergaient les policiers de gaz lacrymogène et prirent la fuite par l’entrée principale, où les attendait encore un complice chargé de faire le guet.

Le trio fut aperçu par un témoin en train de manipuler les armes dans un sac de sport avant de se dispserser. Le couple Rey-Maupin abandonnait leurs cagoules et braquait un taxi parisien à l’arrêt : M. Ahmadou Diallo, quarante-neuf ans, lequel transportait un client, le Dr Georges Monnier, quarante-deux ans.

A l’intersection du Boulevard de Charonne et du Cours de Vincennes, près de la Place de la Nation, le taxi aperçut une Renault 19 sérigraphiée de la Préfecture de Police. Il accéléra à la surprise générale et provoqua délibérément un accident avec les policiers.

Deux des trois agents sortaient du véhicule sans précaution particulière. Alors que M. Diallo s’extirpait de sa 405 pour les prévenir, il fut froidement abattu par Maupin, avec un revolver dérobé à la fourrière.

Thierry Maymard, trente ans, fut blessé mortellement à la poitrine à très courte distance ; tout comme son collègue Laurent Gérard, vingt-cinq ans, frappé par deux projectiles dans le dos.

Régis Decarreaux, trente-trois ans, blessé à l’abdomen, ripostait à quatre reprises et parvint à blesser Maupin à la jambe. La cliente d’un restaurant fut blessée par un projectile ; un passant vit une balle lui érafler le cuir chevelu alors qu’il tentait de porter secours au policier blessé.

Maupin récupérait le revolver d’un policier tué et s’emparait d’une Renault 5 à l’arrêt dont il en extirpait le passager ; il ordonna au chauffeur terrifié de les aider à s’enfuir.

La voiture prit la direction du Bois de Vincennes à tombeau ouvert. Tous les effectifs de la police parisienne étaient alertés. Des agents motocyclistes repéraient la R5 à hauteur de l’hippodrome ; Rey prit appui à l’arrière du véhicule et tira à plusieurs reprises en direction des poursuivants.

Jean-Luc Poulouin reçut une balle dans la mentonnière de son casque et ne fut que légèrement blessé, miraculeusement.

Un barrage de police établi sur l’Avenue de Gravelle dans le Bois de Vincennes bloqua leur progression. Au cours de cette ultime confrontation, Rey était neutralisée et Maupin fut abattu.

Il venait de tuer Guy Jacob, trente-sept ans, motocycliste à la compagnie de Créteil, et de blesser grièvement Sébastien Bloudeau, vingt-quatre ans, de la circonscription d’Alfortville.

M. Stéphan, juge d’instruction, confia l’enquête à la brigade criminelle de la Préfecture de Police qui aboutit à plusieurs interpellations dans les squats de la mouvance autonome. Des textes anarchistes sur une mystérieuse Organisation de la Propagande Révolutionnaire étaient effectivement saisis au domicile de Rey à Argenteuil.

Les enquêteurs s’intéressaient à la provenance des armes ayant servies dans les fusillades. Le premier fusil à pompe a été acheté le 5 juillet à La Samaritaine par un individu qui a présenté sa propre carte d’identité lors de l’achat : Abdelhakim Dekhar, lequel faisait partie de l’environnement de Maupin.

Le deuxième fusil à pompe de marque Mossberg a été acheté le 30 septembre dans le même magasin par Rey, avec un passeport appartenant à Emmanuelle Coupart.

Coupart partageait avec son petit ami Maxime Aubin le domicile d’un couple : Stéphane Violet et Cécile Debrenne. Deux jours après la fusillade, l’enquête démontrait que Dekhar a poussé le couple Violet-Debrenne à quitter la France pour le Portugal parce qu’ils ont fréquenté et hébergé le couple meurtrier.

Interpellé sur la base de l’achat de l’une des armes, Dekhar déclarait avoir agi pour le compte de Philippe Lemoual lequel fréquentait aussi le milieu autonome et a déjà passé cinq ans en prison pour vols à main armée.

Les enquêteurs retrouvaient au domicile de Lemoual, à Suresnes, un autre fusil à pompe et des documents à tendance révolutionnaire, et plus particulièrement un film amateur réalisé par Violet dans lequel il était question d’une prise d’otages et d’un gardien de la paix abattu avec sa propre arme de service.

Dekhar désignait Violet comme l’hypothétique troisième homme aperçu à la pré-fourrière le soir du braquage et recéleur de l’une des armes volées aux agents, or ce dernier était en fuite et ne répondait pas aux convocations.

Le 19 janvier 1996, Violet se présentait au juge d’instruction. Inculpé avec Debrenne pour complicité de vol à main armée et association de malfaiteurs, il faisait l’objet d’un mandat d’arrêt international. Apprenant le placement en détention provisoire du couple Violet-Debrenne, Rey qui s’était murée dans le silence depuis son arrestation, se mit à parler et désignait formellement Dekhar comme étant le troisième homme le soir du braquage.

En outre, le signalement remis par les agents de la préfourrière et un automobiliste témoins de la scène lui correspond. Il était mis en examen non plus pour complicité mais pour vol à main armée et association de malfaiteurs.

Le procès a lieu à la cour d’assises de Paris du 17 au 30 septembre 1998. Rey fut condamnée à 20 ans de réclusion criminelle sans période de sûreté pour « vols à main armée, meurtres et tentatives de meurtres commis sur des personnes dépositaires de l’autorité publique dans l’exercice de leurs fonctions ayant précédé, accompagné ou suivi d’autres crimes, enlèvements et séquestrations de personnes comme otages pour favoriser la fuite des auteurs d’un crime, participation à une association de malfaiteurs ».

Dekhar fut condamné à 4 ans de prison pour la seule association de malfaiteur. Se désignant victime d’un complot de la mouvance autonome, il s’était défini comme un membre du service de sécurité algérien chargé d’infiltrer les milieux islamistes et autonomes, ce qui n’a jamais été prouvé. Hors, il se trouvait incarcéré depuis novembre 1994 et devait rapidement être libéré. Les expertises psychologiques ont établi sa nature mythomane.

Lemoual fut disculpé, après avoir effectué cinq mois de détention provisoire, tout comme Aubin, Coupart, Violet et Debrenne.

Le 2 mai 2009, Rey fut libérée, bénéficiant des remises de peine que tout détenu reçoit automatiquement pour bonne conduite et pour efforts de réinsertion.

Biographie

Direction d'emploi

Préfecture de Police

Corps

Encadrement — Application

Type d'unité

Unité de Voie Publique — Service Général

Titres et homologations

Citation à l'Ordre de la Nation

Croix de la Légion d'Honneur

Né le 15 novembre 1968 à Charenton-le-Pont (Val-de-Marne) ; en union libre, sans enfant.

Entré dans l’administration en 1992 ; 3 ans et 9 mois de services civils et militaires.

Cité à l’ordre de la Nation ; nommé au grade de Chevalier de la Légion d’Honneur et nommé Officier de paix à titre posthume ; médaille d’or des actes de courage et de dévouement ; médaille d’Honneur de la Police Nationale.

Sources et références

BODMR n° 08 du 08/07/1995 ; JORF n°232 du 6 octobre 1994 page 14154, “Citations à l’ordre de la nation” — Libération du 22/05/1996, “Rey-Maupin: l’inconnu de la fourrière” — L’Express du 10/09/1998, “Le cas Florence Rey” — Le Parisien du 17/09/1998, “Cinq morts en vingt-cinq minutes” — Libération du 23/09/1998, “J’ai tiré pour protéger Audry” — Libération du 23/09/1998, “Si elle a raté sa cible, c’est qu’elle était maladroite” — Le Parisien du 30/09/1998, “Vingt ans de réclusion pour Florence Rey”Le Journal du Dimanche du 25/06/2009, “Florence Rey libérée”

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