Mémorial des policiers français Victimes du Devoir
« Il y a quelque chose de plus fort que la mort,
c’est la présence des absents dans la mémoire des vivants. »
Jean d’ORMESSON
Gardien de la paix
Alain PRADINES
Victime du Devoir le 23 mai 1977
Département
Hauts-de-Seine (92)
Affectation
Sécurité Publique (PP) — Nanterre — Brigade Anti-Criminalité
Circonstances
Cause du décès
Homicide par arme à feu
Contexte
Interpellation(s) d'individu(s)
Au cours de la nuit du dimanche au lundi 23 mai 1977, un chauffeur de taxi parisien stationne sa Peugeot 504 face au N°11 de l’avenue Victor Hugo à Neuilly-Sur-Seine (Hauts-de-Seine). Il accompagne une personne âgée jusqu’à son hôtel, en laissant tourner le moteur ; malheureusement une bonne occasion que guettait un malfaiteur pour lui dérober le véhicule.
La victime trouve une patrouille police-secours, et les policiers diffusent aussitôt une alerte par radio. Un véhicule Simca 1100 monté par trois policiers expérimentés de la brigade anticriminalité des Hauts-de-Seine repère et prend en chasse le taxi sur le Boulevard Bineau. Mais le conducteur n’entend bien évidement pas s’arrêter.
Ce dernier prend tous les risques possibles et roule à vive allure en direction du 8ème arrondissement de Paris. Alors qu’il atteint la Place de L’Étoile et gagne l’Avenue Hoche, deux motards de la préfecture de police se joignent à la poursuite. Rue de Lisbonne, Avenue Ruysdael,… Le gredin se retrouve finalement acculé sur la Place Rio de Janeiro, dans une impasse du Parc Monceau.
Lorsque le gardien de la paix Claude Rocourt stoppe la Simca juste derrière le taxi, ses deux équipiers se sont déjà extraits pour interpeller le malfaiteur, lequel tente en vain d’escalader les immenses grilles du Parc Monceau. Pris au piège, il saisit deux revolvers et tire sans hésitation à plusieurs reprises en direction des policiers.
Les gardiens de la paix Maurice Kirn, trente-quatre ans, et Alain Pradines, trente-deux ans, sont frappés de plusieurs projectiles. Ce dernier ne se relèvera pas.
Jean-Pierre Derycke, trente-six ans, est finalement maitrisé. Condamné en mai 1975 à une peine de 9 ans de prison pour divers vols qualifiés commis avec violences, il a pourtant bénéficié d’une permission de sortie de cinq jours pour bonne conduite dès le mois d’avril 1977.
Le 29 Septembre 1978, la cour d’assises de Paris condamne Derycke à la réclusion criminelle dite à perpétuité.
Biographie
Direction d'emploi
Préfecture de Police
Corps
Encadrement — Application
Type d'unité
Unité d'Appui Opérationnel — Service Spécialisé
Titres et homologations
Citation à l'Ordre de la Nation
Né le 21 Octobre 1945 à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) de Marcel Pradines et Lucienne Bouillette ; époux de Nadine Fougeray et père d’un enfant ; domicilié 44/46 Rue de la Butte-aux-Cailles à Paris (XIIIe).
Entré dans la police en Décembre 1966 alors qu’il n’a que 21 ans et tout jeune père, il est affecté à la circonscription de Boulogne-Billancourt jusqu’en 1971 ; année où il rejoint la brigade anticriminalité des Hauts-de-Seine.
Volontaire et courageux, son dossier administratif accumulait les lettres de félicitations de sa hiérarchie.
Nommé brigadier de police à titre posthume, il est le premier policier des Hauts-de-Seine victime du devoir depuis la création de ce département.
Il repose désormais au cimetière de Neuilly-Sur-Seine. Page réalisée avec l’aimable autorisation de sa famille.
Sources et références
BODMR n° 06 du 18/02/1978
BODMR n° 08 du 27/08/1977
État civil Paris VIIIe, acte de décès n°1977/164
Entretien avec Laurence Pradines (sa fille)
Journal télévisé du 23/05/1977 (reportage vers la 20ème minute)
Le Monde, article du 30/09/1978 de Josyane Savigneau, “Caricature”
Le Monde, article du 02/10/1978 de Josyane Savigneau, “Derycke est condamné à la réclusion criminelle à vie”
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Merci EM de m’avoir transmis cette photo ! Et d’avoir pu converser ensemble en 2012 ! Les choses sont remises dans l’ordre ! Merci 🙏 à ce site pour la mémoire de nos policiers ! Et courage pour les nouvelles générations à qui je pense chaque jours
C’est en frappant le nom de votre malheureux collègue, comme je le faisais souvent depuis des années, que je suis tombé sur votre site. Si attendu, si respectable. Émotion à lire le douloureux témoignage de sa fille, à l’enfance brisée auprès d’une maman anéantie. Sans qu’elles l’aient jamais su, il n’y a pas de jour où je n’ai repensé à leur drame. La raison est que j’ai été le seul témoin “non-policier” à être intervenu ce soir là dans poursuite de Derycke. Âgé de 25 ans, tout en terminant mes études, ma passion de la photo m’avait conduit à “travailler” en free-lance pour des agences de presse. Mes appareils ne me quittaient jamais. En voiture, toujours sur le siège passager, prêts à saisir tout évènement insolite. Et Paris, la nuit, n’en manquait déjà pas. Ce soir-là, rentrant chez mes parents, étant sur le point de me garer à l’angle de la rue Saint-Ferdinand et de l’avenue de la Grande Armée, j’aperçois abordant à toute allure la porte Maillot, un taxi venant de Neuilly suivi de très loin par une voiture de police. Le taxi fonce vers l’Étoile. Dans une réaction irraisonnée je le prends en chasse dans le but de le coincer… et pourquoi pas de faire quelques clichés. Je remonte à sa hauteur, sur sa gauche, ayant grillé avec lui tous les feux de l’avenue de la Grande Armée. On arrive à une vitesse folle sur la place de l’Étoile. Je suis à côté du taxi, à moins de 2 mètres. Derycke se tourne vers moi et voyant l’appareil photo que je tends vers lui, manque de m’envoyer sur les grosse bornes qui entourent l’Arc de Triomphe. La voiture de police nous a presque rattrapés. Deux motards de la Police nous rejoignent. Je lève le pied, laisse tout le monde passer et quitter l’Étoile par Wagram, Friedland ou Hoche (je ne me souviens plus). Dans les minutes qui suivent, d’autres véhicules de Police se mettent à sillonner la bordure 8ème/17ème. Derrière le parc Monceau, j’aperçois la voiture de Police de tout à l’heure s’engager dans l’une des deux petites voies qui forment impasse par les grilles du parc. Le drame vient de se jouer il y a quelques secondes. Alain PRADINES est étendu à droite, à quelques mètres de l’entrée de l’impasse. Les motards cherchent Derycke qui s’est caché parmi les arbres et les bosquets qui longent l’impasse devant les immeubles. Ils pensent un moment qu’il a pu sauter les grandes grilles du parc dont personne n’a les clés. Le corps de Monsieur Pradines est recouvert. L’un de ses collègues, blessé est emmené; Des forces de Police arrivent en nombre. Je ressors à pieds de l’impasse. Derycke est retrouvé. Embarqué. L’impasse et les abords fermés à toute circulation car les premiers inspecteurs n’ont pas la certitude que Derycke était seul. Je suis à l’entrée de l’impasse et me permets d’assurer à un enquêteur que Derycke était bien seul dans le taxi. Il me demande d’apporter ce témoignage capital car ils n’en ont pas d’autres. Je récupère ma voiture et file avec lui pour le Quai des Orfèvres où il prend ma déposition après être passés ensemble quelques minutes au commissariat du Rond-Point des Champs-Élysées. Je ressors du 36 vers cinq heures. Avant de rentrer chez moi je passe au labo photo de France-Soir rue de Réaumur afin qu’un ami du labo me tire le film. Malheureusement les clichés de la poursuite sont inexploitables. Seule une photo dans l’impasse est sauvable. Je ne voudrai pas la vendre. Et ne l’ai jamais plus regardée. Seul témoin “civil”, je déposerai au procès conduit par Monsieur Dauwling-Carter et lèverai tout doute quant à l’éventuelle culpabilité d’un complice évanoui dans la nature comme aurait bien aimé le faire croire la défense de Derycke. Avec mes plus respectueux encouragements. E.R