Mémorial des policiers français Victimes du Devoir

« Il y a quelque chose de plus fort que la mort,
c’est la présence des absents dans la mémoire des vivants. »

Jean d’ORMESSON

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Sous-Brigadier — Gardien

Louis MORIN

Victime du Devoir le 02 février 1951

Département

Rhône (69)

Affectation

Sécurité Publique — Lyon

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Circonstances

Cause du décès

Homicide par arme à feu

Contexte

Interpellation(s) d'individu(s)

Au cours de la soirée du jeudi 18 janvier 1951, un fourgon postal blindé doté d’une escorte policière se présentait face au bureau des P.T.T. sis 99, rue Duguesclin dans le 6ème arrondissement de Lyon (Rhône).

L’escorte, composée de deux gardiens de la paix du poste de police de la Place Antonin-Poncet, présents aux côtés du chauffeur, était chargée de protéger l’opération consistant à récupérer la recette de la journée remise par un commis, par une porte de triage.

Alors que le commis était sur le point de se présenter avec un sac renfermant près de six millions de francs, deux individus coiffés de feutres sombres et armés de pistolets-mitrailleurs surgissaient d’une allée.

L’un d’eux tirait aussitôt sur le sous-brigadier Louis Morin, quarante ans, posté près du triage et le blessait grièvement. Puis il tirait une longue rafale en direction des occupants du fourgon ; quatorze impacts criblèrent le pare-brise.

Le gardien de la paix Guy Arnaud, trente-cinq ans, fut tué net ; le chauffeur fut grièvement blessé, mais trouva le courage de bloquer le verrouillage des portes et de déclencher les sirènes.

Un complice était blessé à la jambe par les mêmes tirs. Le malfaiteur subtilisait le pistolet-mitrailleur de l’agent Morin et tirait une dernière rafale en direction du tambour de l’entrée réservée à l’accueil du public. Huit personnes furent blessées, et le sac contenant la recette journalière resta insaisissable.

Le commando prenait la fuite par la rue de Sèze devant témoins, monté à bord d’un véhicule Citroën traction-avant modèle 15-6 dont le numéro d’immatriculation fut relevé.

D’importants barrages de police et de gendarmerie furent établis sur tous les grands axes de l’agglomération lyonnaise. Les enquêteurs de la 10e brigade mobile de la police judiciaire effectuèrent des rapprochements avec plusieurs attaques similaires commises dans la région lyonnaise.

Le 25 janvier, la Citroën fut retrouvée avec des indices déterminants, dissimulée dans les eaux du canal de Jonage.

Le 26, Auguste Jard, soixante-quatre ans, victime civile blessée dans le bureau de poste, succombait à l’hôpital Edouard-Herriot.

A l’aube du 28, des rafles d’envergure furent opérées dans les milieux crapuleux de Villeurbanne et Vaulx-en-Velin. Des langues se délièrent ; les enquêteurs exploitent l’environnement de malfaiteurs espagnols.

Le 31, interpellation de Juan Sànchez, trente-sept ans, qui dénonça deux frères, José et Francisco Bailó-Mata, âgés respectivement de vingt-huit et trente-quatre ans. Ces derniers seraient venus spécialement de la région toulousaine pour commettre le braquage.

Deux autres complices étaient confondus, Antonio Guardia-Socada, trente-quatre ans, et Juan Catalàn-Balaña, trente-sept ans ; ce dernier étant gravement blessé par balle à la cuisse.

Le 2 février, l’agent Morin succombait à l’Hôtel-Dieu.

Le 5, le corps sans vie de José Bailó-Mata était découvert dans un abri de jardin à Vénissieux, avec une importante plaie par balle à la tête.

Il fut établi que le 18 janvier, les malfaiteurs avaient agi au nombre de cinq ; deux tireurs avaient pour charge de neutraliser l’escorte tandis que deux complices devaient voler le fourgon postal, un chauffeur restant en retrait à bord de la traction.

Selon Sànchez, cette expropriation, selon le terme anarchiste, était destinée à servir la lutte contre le franquisme. Le noyau dur de malfaiteurs était effectivement issu de la résistance républicaine espagnole ; exilés en France après avoir lutté contre le régime de Franco, ces derniers se sont aguerris dans les maquis aux côtés des francs-tireurs partisans pendant l’Occupation allemande.

Les enquêteurs soupçonnaient que l’association de malfaiteurs agissait pour le compte d’un groupe d’action révolutionnaire alimenté par la Confédération Nationale du Travail espagnole.

Tous fréquentaient la Fédération Anarchiste Ibérique de la rue Saint-Jean, près du Palais de Justice. Les pistolets-mitrailleurs ayant servis dans l’attaque furent effectivement retrouvés fortuitement dans un local de la CNT de Villeurbanne en décembre 1959.

En janvier 1955, la cour d’assises du Rhône jugea quatorze membre du gang des espagnols pour dix-neuf agressions et vols à main armée commis entre 1945 et 1951, pour un butin estimé à vingt-cinq millions de francs.

L’attaque du fourgon postal à Lyon ne représentait qu’une partie de leur activité, qui s’étendait sur toute la France. Deux cent vingt-deux arrestations furent opérées ; trente-sept seulement concernaient des individus impliqués dans des agressions commises dans la région lyonnaise et iséroise.

Désigné comme le meurtrier des agents Arnaud et Morin, et de M. Jard, Sànchez fut condamné à la peine de mort ; l’arrêt fut cassé le 12 mai suivant, et il écopa de la réclusion criminelle dite à perpétuité.

Guardia-Socada et Bailó-Mata écopèrent des travaux forcés dits à perpétuité ; Catalàn-Balaña de 20 ans de réclusion criminelle, et bénéficia d’une libération conditionnelle après 14 années d’incarcération passées à Fresnes.

Biographie

Direction d'emploi

Sécurité Publique

Corps

Encadrement — Application

Type d'unité

Unité de Voie Publique — Service Général

Titres et homologations

Citation à l'Ordre de la Nation

Né le 30 septembre 1910 à Montluel (Ain) de Pierre Morin et Julie Dorléans, marchands de fromages ; époux de Marie Boujon et père de trois enfants ; famille domiciliée N°64 Route de Strasbourg à Caluire-et-Cuire.

Louis Morin était ouvrier en produits chimiques lorsqu’il fut mobilisé en 1939, date de son mariage. Portrait diffusé ci-dessus avec l’aimable autorisation de sa petite-fille.

Cité à l’ordre de la Nation ; médaille d’Honneur de la police française.

Sources et références

BODMR n° 04 du 08/05/1951 ; Documentation de la Société Lyonnaise d’Histoire de la Police – Michel Salager — El Maquis Anarquista par Sanchez-Agusti et Feran, éd. Milenio, 2006 Lyon criminel par André Séveyrat, éd. Fenixx, 1974 — Association “24 août 1944”, article du 28/01/18, “Felisa Bailo-Mata, une companera de vida de lucha” — L’Impartial du 13/01/1955, “Le procès des espagnols s’est ouvert à Lyon” — Le Monde du 02/12/1959, “A Villeurbanne, une explosion accidentelle fait découvrir un stock d’armes […]” — Le Monde du 31/03/1951, “Le gang des espagnols de Lyon a commis 19 attaques à main armée” Le Monde du 07/02/1951, “Le bandit José Bailo-Mata s’est suicidé” — L’Intransigeant du 02/02/1951, “Paco, tueur n°2 du gang des espagnols, arrêté cette nuit” — L’Intransigeant du 01/02/1951,”Les auteurs du hold-up tragique de Lyon : des anarchistes espagnols” Ce Soir du 04/02/1951, “Le garde Morin a succombé”Ce Soir du 03/02/1951, “Traqué par la police, “Pépé”, chef des gangsters de la rue Duguesclin […]” Ce Soir du 01/02/1951, “Hold-up de Lyon, trois suspects arrêtés”Ce Soir du 20/01/1951, “Les gangsters de Lyon n’ont pas volé les 6 millions du fourgon postal […]”

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