Mémorial des policiers français Victimes du Devoir
« Il y a quelque chose de plus fort que la mort,
c’est la présence des absents dans la mémoire des vivants. »
Jean d’ORMESSON
Brigadier
Joseph FLEURANT
Victime du Devoir le 27 septembre 1904
Département
Hauts-de-Seine (92)
Affectation
Police Municipale (PP) — Neuilly-sur-Seine
Circonstances
Cause du décès
Homicide par arme à feu
Contexte
Interpellation(s) d'individu(s)
Au cours de la nuit du vendredi au samedi 24 septembre 1904, la demeure du célèbre compositeur Albert Renaud, alors en déplacement en Autriche, était cambriolée après avoir fait l’objet de repérages crapuleux. Sise au 46 rue de Chézy à Neuilly-sur-Seine (Seine), des amis chargés de nourrir chaque matin les animaux domestiques avaient remarqué la présence de morceaux de papiers coincés dans les interstices des portes, destinés à savoir si le pavillon était occupé.
Alerté, le commissariat de police local n’avait pu mettre en place qu’une surveillance de quelques jours. Le préjudice, très important, portait essentiellement sur des vols de bijoux.
Au cours de cet été, plusieurs cambriolages et attaques nocturnes au mode opératoire singulier survenaient dans les communes des Hauts-de-Seine. L’enquête de voisinage mit en évidence les allers-et-venues de deux suspects, étrangers au quartier ; les témoins s’accordant tous sur un détail précis : le plus grand des individus trainait bruyamment des talons, une habitude qui retenait forcément l’attention.
Le précieux renseignement fut une révélation pour un policier du commissariat de Levallois-Perret ; l’agent Theo est formel : il s’agissait d’un bandit qu’il a maintes fois arrêté ; un certain Henri Van-Brussel, vingt-sept ans, alias Riton.
Ce malfaiteur déjà condamné à sept reprises pour vols qualifiés, était pourtant interdit de séjour en France.
Le jour même, M. Simard, commissaire de police de Neuilly, charga le brigadier Fleurant et le sergent de ville Joachim d’exécuter un mandat d’amener à son encontre. Les agents observèrent tout le jour durant la maison de ville habitée par la mère du suspect, au 46 rue Victor-Hugo à Levallois-Perret. Les policiers obtenaient du voisinage la certitude que le suspect y avait trouvé refuge.
Dans la soirée, les deux agents en bourgeois se présentèrent au domicile de Mme Van-Brussel, qu’elle occupait en qualité de concierge. A peine eurent-ils annoncé leur qualité que des éclats de voix surgissaient de la pièce de vie. L’imposant voyou tenta aussitôt de fuir par le couloir en portant de violents coups aux agents de la sûreté, aidé par sa mère !
Dans la lutte avec l’agent Joachim qu’il parvient à désarmer, Riton provoqua un tir dont le projectile éclate le plafond, puis il assena de plusieurs coups la tête du policier avec la crosse. Alors que le brigadier Fleurant vint le saisir vigoureusement, Riton lui tira dessus à bout touchant. Atteint à la poitrine, le brigadier Fleurant s’écroula agonisant.
Riton prit la fuite, mais des voisins le stoppaient net dans sa course. Il fut interpellé sans ménagement, à tel point qu’il fut transporté inconscient à l’hôpital Beaujon, sous bonne garde.
Dans la nuit, il tenta cependant de corrompre un infirmier en lui offrant des bijoux volés encore en sa possession contre son évasion. Il est transféré à l’infirmerie du dépôt.
Le brigadier de sergents de ville Joseph Fleurant, soixante-deux ans, reçut la médaille d’honneur de 1ere classe – échelon Or – que lui conféra le Gouvernement sur la proposition du Préfet de police. Il succomba dans la salle Malgaigne, lit N°18 à l’hôpital Beaujon, après trois jours d’une insupportable agonie. Son équipier obtint la médaille d’argent.
Confronté au juge d’instruction Bourdeau, du parquet de la Seine, Van Brussel déclara : “Si j’ai agi ainsi, c’est par haine de la police…” Les hommes du commissaire Simard parvenaient après cinq jours de recherches à mettre la main sur le complice de Van-Brussel dans le cambriolage du pavillon de la famille Renaud. Pris en flagrant délit de recels des bijoux, il s’agissait de Joseph Varriéras, dix-huit ans, dit l’ouverture. Ils sont confondus au cours de leur détention dans plusieurs affaires de cambriolages et d’attaques domiciliaires nocturnes.
Le 31 Mai 1905, la cour d’assises de la Seine condamna Van-Brussel aux travaux forcés et à la relégation à perpétuité. Son complice écopa de quatre ans de prison.
Le 5 septembre 1923, après dix-huit ans de bagne, Van-Brussel décèdait en colonie pénitentiaire de Saint-Laurent-du-Maroni en Guyane Française.
Biographie
Direction d'emploi
Préfecture de Police
Corps
Encadrement — Application
Type d'unité
Unité de Voie Publique — Service Général
Né le 23 avril 1842 à Guermange (ex-Meurthe ; Meurthe-et-Moselle), de Joseph Fleurant et Catherine Petitjean ; époux de Catherine Renner ; père de trois enfants ; domiciliés n°51 Rue Borghèse à Neuilly (ex-Seine ; Hauts-de-Seine).
Incorporé le 15 octobre 1868 au 12e régiment d’artillerie, il fut libéré le 1er mai 1871 avec le grade de maréchal des logis chef après la campagne contre l’empire allemand.
Instituteur en langue française en Lorraine désormais annexée, il fut encouragé à quitter ses terres natales pour devenir comptable dans plusieurs maisons de commerce à Nancy.
A Paris, avant son entrée à la Préfecture de police, il fut employé pendant quelques semaines comme auxiliaire à l’administration des postes.
Nommé le 1er juin 1885, sergent de ville au commissariat de la circonscription de Vincennes, il fut promu brigadier au commissariat de Saint-Denis-Nord le 10 décembre 1894. Il fut grièvement blessé par balles par un malfaiteur, et passa ensuite, en la même qualité, à Neuilly-sur-Seine.
Le brigadier Fleurant était un excellent serviteur qui avait à son actif de nombreux actes de courage et de dévouement, et d’arrestations de bandes de voleurs qualifiés. Il obtint la médaille d’honneur en bronze en décembre 1903.
Inhumé le 1er octobre 1904, au cimetière de Neuilly-sur-Seine, dans une concession perpétuelle accordée par le Conseil municipal de cette ville.
Sources et références
État civil Paris (VIIIe), acte de décès 1904/1858 — Conseil municipal de la ville de Paris, rapports et documents, année 1913, page 144 — La Presse du 31/05/1905, “Les tribunaux : vols et assassinats” — Le Petit Journal du 01/10/1904, “L’assassinat du brigadier Fleurant” — Le Journal du 27/09/1904, “Une arrestation tragique”
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